La perte des repères
Comme nombre de Rose-Croix, je “milite” depuis de nombreuses années pour le retour de la morale à l’école, et ce, sans aucune arrière-pensée idéologique ou politique. À moins d’être de mauvaise foi, on ne peut nier que la société n’a cessé de perdre ses repères moraux au cours des dernières décennies, au point de donner l’impression d’être décadente. Quoi qu’on en dise, les valeurs nécessaires au « bien vivre ensemble » ont progressivement disparu au profit d’un comportement individualiste fondé sur la négation de l’autre et le « chacun pour soi ». Si nous voulons remédier à cet état de fait et favoriser le lien social, il faut impérativement réinstaurer ces valeurs.
La morale : une nécessité citoyenne
De nombreuses personnes, parmi lesquelles des enseignants et des éducateurs, s’opposent au “retour” de la morale à l’école, considérant que c’est une mesure réactionnaire qui nous ramènerait à une époque révolue. De mon point de vue, cette opposition de leur part est très dommageable, car elle ne tient pas compte de la réalité sociale actuelle et ne fait qu’aggraver la situation. Elle me semble d’autant plus regrettable que la morale n’est ni de gauche, ni de droite, ni du centre… Elle n’est pas non plus l’apanage de la religion. Elle répond à une nécessité citoyenne et constitue le fondement de la vie en société, de sorte qu’il devrait y avoir consensus en la matière.
Morale ou étique ?
Que faut-il entendre par « morale » ? Comme cela est expliqué dans l’Ordre de la Rose-Croix, il s’agit d’inculquer aux enfants le respect d’eux-mêmes, des autres et de l’environnement. Chacun devrait convenir qu’une telle définition n’a rien de moralisateur. Par extension, la morale, qu’il faudrait peut-être désigner sous le terme « éthique » pour lui retirer toute connotation religieuse et lui donner une connotation plus laïque, consiste à expliquer aux enfants en quoi il est bien et utile de se montrer polis, ponctuels, tolérants, patients, généreux, modestes, courageux, honnêtes, etc. Là encore, je ne vois pas en quoi il est “ringard” et déplacé de les encourager à éveiller de telles vertus. En quoi cela peut-il être négatif ou préjudiciable ?
L’enseignement de l’éthique
Certes, ce sont les parents qui devraient inculquer l’éthique à leurs enfants, mais la plupart n’ont plus les repères voulus pour le faire ou n’en voient pas l’intérêt. C’est pourquoi il est devenu nécessaire de (re)confier en partie ce rôle à l’école. En fait, on n’aurait jamais dû mettre fin aux « leçons de morale » qui faisaient autrefois partie du programme scolaire et que tous les enfants appréciaient. Sans doute aurait-il fallu les adapter à l’évolution de la société, mais elles avaient leur raison d’être. Toujours est-il que l’enseignement de l’éthique (à ne pas confondre avec l’instruction civique) devrait être systématique et faire l’objet d’une discipline à part entière, au même titre que les matières dites fondamentales. Par ailleurs, je pense qu’elles devraient être obligatoires et non pas laissées à l’initiative des enseignants (je l’ai moi-même été), comme c’est le cas actuellement dans de nombreux pays.
Officialiser et systématiser l’importance de l’éthique
La question qui se pose est naturellement de savoir comment enseigner l’éthique à l’école. Je pense que le mieux serait tout simplement de choisir chaque jour un proverbe, un adage ou une maxime (qui pourraient être regroupés dans un recueil destiné à l’enseignant), de l’écrire sur le tableau à la vue de tous (comme cela se faisait jadis), et d’engager une réflexion avec les enfants durant une quinzaine de minutes. Une telle manière de faire contribuerait à officialiser et systématiser l’importance de l’éthique. Là encore, certains diront que c’est dépassé et que cela nous ramènerait inutilement en arrière. Est-ce à dire que tout ce qui était fait autrefois à l’école était stupide et infondé ? Ce n’est pas mon sentiment. Pour s’en convaincre, il suffit de constater ce qu’il en est de la société actuelle.