«Tous les goûts sont dans la nature»
Régulièrement, des expositions d’art dit « moderne » ou “contemporain” sont présentées aux quatre coins du monde, non sans faire l’objet d’une couverture médiatique généralement valorisante, voire dithyrambique. Comme chacun sait, il est courant de dire que «tous les goûts sont dans la nature», que «les goûts et les couleurs ne se discutent pas», qu’«il en faut pour tous les goûts», etc., ce qui laisse supposer que chacun a sa conception et sa perception de l’art, ce qui est vrai dans l’absolu.
«L’art multiplie les impostures»
Au risque de paraître étroit d’esprit, rétrograde et que sais-je encore, je pense néanmoins que l’art multiplie les impostures dans quasiment tous les domaines qui s’en réclament. Des tâches multicolores projetées sur un mur, un point blanc au milieu d’un fond noir, un enchevêtrement d’objets hétéroclites trouvés pour certains dans des poubelles, une montagne informelle de chiffons, des objets métalliques concassés, des ballets où les danseurs s’exhibent nus, des concerts réalisés avec des instruments cassés ou déréglés, etc., suscitent l’admiration et sont qualifiés d’œuvres artistiques. Que dire également du prix auquel certaines peintures et sculptures sont vendues et achetées ?
La spéculation intellectuelle
Comme nombre de Rose-Croix, je pense que la fonction première de l’art, quel qu’en soit le domaine, est d’exprimer la beauté et son corollaire : l’harmonie. Dès lors que l’on doit réfléchir pour comprendre le « message » que l’artiste a voulu transmettre à travers sa peinture, sa sculpture, sa musique, etc., on est davantage, me semble-t-il, dans le domaine de la spéculation intellectuelle que du sentiment artistique. De mon point de vue, l’art ne saurait se réduire à la fantaisie, au culot, et encore moins à la provocation. Or, l’intellectualisme, le snobisme, l’anticonformisme, le mercantilisme, etc., l’ont beaucoup dénaturé, tant dans le fond que dans la forme.
Servir la beauté et l’harmonie
Ces quelques réflexions n’ont pas pour but de critiquer l’art moderne et l’art contemporain en tant que tendances ou courants artistiques, car ils ont donné lieu à d’authentiques chefs-d’œuvre. De leur côté, l’art classique et l’art traditionnel ne sont pas non plus exempts d’impostures. Et d’ailleurs, est-il judicieux de parler d’art classique, d’art traditionnel, d’art contemporain, d’art moderne ou autre ? Ne faudrait-il pas parler d’art, tout simplement, et le mettre véritablement au service de la beauté et de l’harmonie, lesquelles sont intemporelles et universelles ?
La «science du beau»
Dans la plupart des livres de référence, l’art est défini comme étant «l’expression d’un idéal esthétique et l’ensemble des activités créatrices visant à cette expression». Or, le mot «esthétique» signifie littéralement «science du beau». Cela veut dire que l’art, par définition, est l’activité qui consiste à exprimer la beauté à travers différents vecteurs, parmi lesquels la musique, la peinture, la sculpture, la danse, etc. Pour reprendre l’expression de Joséphin Péladan, qui fut l’organisateur des Salons de la Rose-Croix tenus à Paris en 1892, il présuppose le désir d’accomplir un «geste esthétique». Je pense que nous nous sommes beaucoup éloignés de cet idéal. Mais il n’est pas trop tard pour lui (re)donner tout son sens et toute sa valeur…